
• Il s'économise,
Le Lann,
Eric de son prénom, trompettiste de passion. À sa manière, il est une contradiction de
Lee Konitz ou
Paul Bley côté production. De-que-cé? Il n'aligne pas trois ou cent albums par an. Mais quand il en sort un, c'est la joie comme dans y'a de la joie. Toujours est-il qu'il y a peu, le Breton s'est acoquiné avec trois Américains qui ne sont plus des jeunesses sans être pour autant des vieux de la vieille. Soit le pianiste
David Kikoski, le contrebassiste et producteur de la session
Douglas Weiss, ainsi que le batteur
Al Foster, qui fut dans les années 70 l'espion de Miles Davis. Oui, oui... l'espion! Lorsque ce dernier avait décidé de se mettre entre paranthèses, c'est Foster, avec la complicité de
Gil Evans, qui rapportait au maître des
All Blues les nouvelles de la scène musicale.
• Bon, de quoi s'agit-il? Le Lann vient de publier un album sans nom particulier sur l'étiquette française Plus Loin Music, qui a succédé, pour ainsi dire, au label Nocturne ayant sombré corps et biens lors de la tourmente qui a ratiboisé quantité de petites compagnies. À moins que l'on soit totalement dans le champ comme dans les patates, ce qui se pourrait fort bien, cet album serait le premier à paraître sur Plus Loin Music.
• Bien, et l'album, direz-vous? Il est coton. Oui, oui... c'est de la ouate de grande qualité. Drôlement bien tissée, drôlement bien ficelée. Le résultat est d'autant plus remarquable, convaincant et séduisant que la plupart des morceaux proposés ont été écrits par un Le Lann ayant acquis une telle maturité qu'il s'est affranchi des genres ou styles. Comme s'il avait décidé d'effectuer un décloisonnement. Comme s'il avait décidé d'emprunter ceci à Davis, cela à Chet Baker, une grosse pincée à Art Farmer et une autre à Woody Shaw pour en faire une alchimie qui lui soit propre. Avec ce disque, Eric Le Lann se pose en classique dans le sens élégant du terme et non antique.
• P.-S.: on a trouvé notre copie chez Archambault-Berri. Le prix? 25 $ sans les taxes. Comme Plus Loin Music a un représentant à Montréal, ça s'obtient facilement.
• N.B.: dans le vidéo ci-dessous, Le Lann joue Yesterdays, le standard de Jérôme Kern, avec Billy Hart à la batterie et non Foster, ainsi qu'avec Thomas Bramerie à la contrebasse et non Weiss.